Testi

Indipendenza

16.11.2002

Parti gouvernemental ou parti d’opposition?

Mon discours au congrès de l'UDC, Lupfig 16. novembre 2002

03.11.2002

La faillite du Credit Suisse? Il faut s’y préparer

Interview dans Dimanche du 3 novembre 2002 Invité au Forum économique de Glion, le président de l'UDC zurichoise s'exprime sur le potentiel de son parti en Suisse romande, la crise économique, le Credit Suisse, l'initiative sur l'asile et la succession au Conseil fédéral. Texte Marc Comina Cette année, c'est déjà la deuxième fois que vous séjournez à Glion. Qui vous avait invité en avril? Christoph Blocher: Anne-Lise Monnier m'avait invité à participer à un repas in-formel avec des décideurs romands. Il y avait une trentaine d'entrepreneurs et de managers. Comme toujours dans le canton de Vaud, un conseiller d'Etat - Jean-Claude Mermoud - était de la partie. Il y avait surtout des libéraux et des radicaux. Nous avons discuté d'économie à l'abri des regards de la presse. Cette rencontre est-elle le signe que, en Suisse romande, vos idées sont aujourd'hui mieux acceptées? Blocher: C'est tout à fait évident. J'y vois plusieurs raisons. En économie, on comprend que les recettes que je combats depuis toujours sont effectivement mauvaises. J'ai toujours été contre le gigantisme et le copinage. Or la débâcle de Swissair et les problèmes de Swiss Life en sont la conséquence directe. En politique, je me bats pour que les impôts n'augmentent pas. Enfin, il y a la ques-tion européenne. A cause de mon combat contre l'adhésion à l'UE, j'ai longtemps été l'ennemi des Romands. Ici, il y a dix ans, on ne débattait pas de ce thème. Soit vous étiez pour, soit vous étiez un égoïste. Aujourd'hui, les gens voient les choses de façon plus différenciée. Dans les journaux aussi, on parle des avant-ages et des inconvénients de l'adhésion, des défauts de la construction européenne, etc. Vous pensez donc pouvoir gagner encore des voix chez les Romands? Blocher: Si nous faisons bien les choses avec les bonnes personnes en s'attaquant aux vrais problèmes, je suis convaincu que nous pouvons obtenir 25% des voix en Suisse romande, en 2003 déjà. Combien de sièges espérez-vous gagner? Blocher: Je n'ai pas fait de comptes, mais dans le canton de Vaud, nous devrions pouvoir gagner des sièges supplémentaires; de même qu'à Fribourg et à Genève. Etes-vous inquiet de la situation économique en Suisse? Blocher: Pas seulement en Suisse. Une forte récession est en train de frapper les Etats-Unis, l'Europe et le Japon. Elle est la conséquence de la période de forte croissance que nous avons connue ces dernières années. La conséquence? Blocher: Les Etats-Unis ont connu leur plus longue période de haute conjoncture depuis la Seconde Guerre mondiale. Douze ans d'affilée. Du jamais vu. Que fait-on quand les choses vont si bien? Des bêtises. L'argent est disponible, les choses se font presque d'elles-mêmes, même les managers incompétents ont du succès. Tout le monde vise le gigantisme, la globalisation. Je n'y ai jamais cru. L'être humain n'est tout simplement pas capable de diriger des structures aussi gros-ses. Tôt ou tard, il faut payer les pots cassés et corriger les erreurs. Il n'y a donc pas de motif particulier d'inquiétude: la croissance reviendra. Mais nous sommes au début de cette récession, et il ne faut pas croire que la reprise est pour le prin-temps. Cela va durer des années. Le Credit Suisse est-il en danger de faillite? Blocher: Je ne crois pas qu'il soit au bord de la faillite, mais nous sommes aujourd'hui dans la situation où cette éventualité ne peut plus être exclue. Si j'étais conseiller fédéral, je me tiendrais prêt à réagir au cas où une banque de cette taille ferait faillite. Il faut réfléchir dès aujourd'hui à des solutions. L'Etat devrait-il faire comme pour Swissair: payer? Blocher: Peut-être que l'Etat serait même obligé de le faire. Tant de personnes et de sociétés seraient concernées. Ce serait un tremblement de terre qui exigerait une véritable aide en cas de catastrophe. Mais je n'ai pas de solution toute faite. Le Conseil fédéral ferait bien de se préparer aussi à l'éventualité d'une faillite chez les assureurs, par exemple chez Swiss Life. Vous étiez contre l'intervention de l'Etat pour Swissair et vous pourriez y être favorable dans le cas d'une banque ou d'une assurance? Blocher: Dans le cas de Swissair, je n'étais pas contre le fait de rapatrier les passagers disséminés dans le monde ou de limiter tant que possible les dégâts. Mais je me suis opposé à la participation de l'Etat dans la nouvelle compagnie. De même, je serais totalement opposé à ce que l'Etat nationalise d'une certaine manière le Credit Suisse. Pensez-vous que le Conseil fédéral se prépare au pire? Je crains que non. Mais il devrait le faire. Je ne veux pas dramatiser inutilement: beaucoup de grosses banques ont disparu dans le monde sans que cela ne pro-voque de grande crise. Mais dans les années 1930, une crise mondiale a fait suite à l'effondrement d'établissements financiers. Il faut garder cela à l'esprit, y Blocher: réfléchir. Il faut toujours avoir réfléchi au worst case. Votre initiative sur l'asile a-t-elle une chance d'être acceptée? Blocher: Elle a une chance de l'être, mais avec la campagne du Conseil fédéral, ce sera difficile. Jusqu'à récemment, il disait que cette initiative enfonçait des portes ouvertes, que nos propositions étaient incluses dans les projets du gouver-nement. Puis il a suffi d'un sondage pour qu'on dise qu'elle est très dangereuse, qu'elle conduirait à plus de criminels, des coûts plus élevés, etc. Le Conseil fédéral pense que, si c'est le gouvernement fédéral qui le dit, les gens vont suivre son opinion. Moi, j'espère que nous allons gagner, même si, en termes élector-aux, ce serait cependant beaucoup mieux pour l'UDC si elle était refusée. Pourquoi? Blocher: Tellement de promesses ont été faites par le Conseil fédéral qui, comme chaque fois, ne seront pas tenues. A l'époque de notre première initiative, on nous avait promis qu'il n'y aurait plus un seul trafiquant de drogue parmi les requérants d'asile. Cinq ans plus tard, le trafic de drogue passe précisément par là. On a entendu que l'UDC allait soutenir la candidature de Patrizia Pesenti. Vous confirmez? Blocher: Pas du tout. Pour l'instant, nous n'avons entendu aucun candidat. Des réponses qu'elle donne, je vois cependant que c'est celle qui a l'esprit le plus clair. Mais rien n'a encore été discuté à l'interne. A-t-on besoin d'une femme pour remplacer Ruth Dreifuss? Blocher: Non, on a besoin d'un politicien, que ce soit un homme ou une femme, cela ne joue aucun rôle. Mais si une femme compétente est présentée, il n'y a aucune raison de ne pas voter pour une femme.  

02.11.2002

Nous n’avons pas besoin de génies au gouvernement

Interview dans Le Temps du 2 novembre 2002 Christoph Blocher, invité du Forum de Glion vendredi, estime que la re-présentation féminine au Conseil fédéral est un argument moins important qu'il y a dix ans. Le conseiller national UDC zurichois évoque le rôle qu'entend jouer son parti face aux échéances électorales et ses per-spectives en Suisse romande, ainsi que la situation économique du pays. Texte Yves Petignat et Jean-Marc Béguin Invité du Forum de Glion, Christoph Blocher a profité de l'occasion pour passer en revue et commenter les thèmes de l'actualité politique suisse. De la succession de Ruth Dreifuss au Conseil fédéral à la restructuration de La Poste en passant par les élections de 2003, l'initiative de son parti sur l'asile et la situation éco-nomique, le conseiller national UDC zurichois répond au Temps. Le Temps: Quel objectif visez-vous en présentant un candidat UDC à la uccession de Ruth Dreifuss, puisqu'il n'a aucune chance? Christoph Blocher: C'est une stratégie de responsabilité. L'UDC est le plus grand parti de Suisse, il doit signaler à chaque occasion qu'il est prêt à gouverner. On dira qu'il est plus intéressant d'être dans l'opposition que dans le gouvernement, cela permet de bouger davantage. Mais nous voulons mettre en demeure les radicaux et les démocrates-chrétiens en les obligeant à répondre à cette question: voulez-vous continuer à gouverner avec les socialistes, ou êtes-vous prêts à gouverner avec l'UDC? S'ils n'élisent pas notre candidat, ils indiqueront qu'ils ne sont pas prêts à gouverner avec nous. Si tel est le cas, pourquoi ne vous retirez-vous pas du gouvernement? Blocher: Il nous est interdit de sortir, sauf si on nous chasse! Cela voudrait dire que nous choisissons la pure opposition. L'opposition est certes une chose nécessaire, pour un gouvernement comme dans une entreprise. Mais nous voul-ons montrer que nous sommes aussi prêts à travailler, à construire. A l'intérieur du gouvernement, au moins pouvons-nous améliorer un peu la qualité des décisions. Pourquoi ne vous présentez-vous pas vous-même? Blocher: En réalité, je n'ai pas envie d'être conseiller fédéral. Je préfère être numéro un dans mon entreprise, Ems-Chemie, plutôt qu'un parmi sept à Berne. Et puis, je n'ai pas le goût de l'administration. Tous ces règlements, ces lois, ce n'est pas mon genre. D'ailleurs, si j'étais élu, les autres se réjouiraient de pouvoir enfin me ligoter. Ils pensent que je serais moins fort qu'en dehors du gouvernement, et c'est sans doute vrai. Cela dit, si l'on m'élisait, je pense que je serais capable et je ne me déroberais pas. Quelle est votre opinion sur les candidats socialistes? Blocher: Je n'en connais qu'un, Jean Studer. Les autres... c'est comme en 1999. Ruth Metzler n'a gagné que d'une voix devant Rita Roos. Je lui ai toujours dit qu'elle me devait son élection, car cette voix, c'était la mienne! Et pourquoi ai-je voté pour elle, qui m'était parfaitement inconnue? Parce que je connaissais sa concurrente, dont je ne voulais pas! Mais, au fond, tout cela n'a pas beaucoup d'importance: un candidat ou un autre, c'est un peu la même chose. A Berne, c'est de toute manière l'administration qui gouverne. Jean Studer serait donc, en définitive, un candidat acceptable? Blocher: Un socialiste reste un socialiste... mais pourquoi pas, si un socialiste doit être élu? Encore une fois: nous n'avons pas besoin de génies au gouver-nement. Mieux vaut des gens modestes, bons gestionnaires, qui ne cherchent pas à en faire trop. Pourquoi pas Jean Studer? Vous n'êtes donc pas sensible à la revendication féminine? Blocher: Ce n'est plus une question très importante. Ce fut le cas il y a dix ans, peut-être. Ma femme est mieux représentée en politique par moi que par beau-coup d'autres femmes... Pour l'UDC, cette élection n'est qu'un galop d'essai avant le test important de décembre 2003, qui suivra les élections fédérales. Vous réclamez à cor et à cri un deuxième siège au Conseil fédéral contre le PDC: que se passera-t-il s'il vous est refusé? Blocher: Nous continuerons notre stratégie d'opposition et nous l'amplifierons. Je ne suis pas pressé: il faut du temps en politique pour triompher. Lula, au Brésil, a attendu vingt-deux ans. Moi j'ai commencé il y a vingt-six ans en devenant président de l'UDC zurichoise. Regardez le chemin déjà parcouru! Quels sont vos objectifs en Suisse romande? Blocher: Je ne peux pas gagner la Suisse romande moi-même: aux UDC romands de le faire. Mais le potentiel est énorme. L'attitude vis-à-vis du parti et de ma personne a complètement changé. J'ai été longtemps diabolisé, aussi long-temps que les élites pro-européennes m'ont désigné comme l'ennemi de la cause, le faiseur du «Röstigraben». En 1992, au moment de la votation sur l'EEE, on re-fusait de m'interviewer en Suisse romande. Si j'apparaissais en public, je recevais des œufs ou des tomates. Pourtant, je n'ai pas changé. Je suis resté fidèle à mes idées. Ce sont les gens qui ont changé. Quelles chances donnez-vous à votre initiative sur l'asile, le 24 novembre, à la-quelle les premiers sondages sont très favorables? Blocher: J'ai peur de l'échec. Depuis la publication des sondages, le Conseil fédéral a changé de politique. Il est tout d'un coup très ferme vis-à-vis des emandeurs d'asile. Regardez le renvoi précipité des Rom! Ils vont encore faire quelques gestes spectaculaires de ce genre. Et, après la votation, tout re-commencera comme avant. – Mais votre initiative, qui propose le renvoi des re-quérants dans le pays de premier accueil, est impraticable dans la réalité. Si le texte est accepté et que rien ne change, on dira que l'UDC a trompé les électeurs. – C'est notre responsabilité et nous sommes prêts à l'assumer. Je ne dis pas que l'on peut apporter une solution parfaite à ce problème. Ce qui compte, c'est de donner un signal politique. Il faut rendre la Suisse moins attractive. La Suisse paraît entrer dans une période de tensions sociales: craignez-vous qu'elles ne s'aggravent? Blocher: Les choses sont toujours plus dures en période de récession, et les tensions ne feront qu'augmenter avec la libre circulation des personnes en pro-venance de l'Union européenne. La compétition va s'accroître sur le marché du travail. Mais je ne crois pas à une confrontation longue, ni dure. Les perspectives conjoncturelles sont pourtant très noires. Blocher: La récession ne sera pas courte. Il s'agit d'un ajustement classique après une période de haute conjoncture, pendant laquelle les gens font toujours beaucoup de bêtises. Tout le monde a trop investi. Moi-même, dans mon entre-prise, j'ai sans doute succombé à cette tentation. Il faut donc le temps de la correction. Et puis l'activité repartira. Le gouvernement ne doit rien entreprendre pour relancer la machine? Blocher: Lorsqu'il le fait, c'est toujours trop tard. Bien sûr, on peut libérer quel-ques forces pour des investissements, comme les routes nationales, pourvu qu'on économise ailleurs, dans l'administration. Mais la seule bonne politique, au-jourd'hui, serait une baisse des impôts et des taxes. Cela donnerait un avantage concurrentiel formidable à la Suisse, au moment où l'Allemagne s'apprête à en-core augmenter sa fiscalité. Beaucoup d'entreprises allemandes seraient alors incitées à déménager chez nous, et tout le monde en profiterait. Que pensez-vous de la décision de La Poste, qui va supprimer 15 centres de tri, au détriment des régions périphériques, dont la vôtre? Blocher: C'est sans doute la meilleure solution industrielle, il n'y a donc pas à hésiter. On peut donner autre chose aux régions périphériques. Je trouve plus utile de conserver quelques bureaux de poste dans les villages, par exemple. Vous restez décidé à entrer au conseil d'administration de Lonza: est-ce parce que vous ne faites pas confiance à la direction de l'entreprise? Blocher: Après la vente des actions de Martin Ebner, je suis devenu le premier actionnaire. Il est donc tout à fait normal que je puisse exercer ma responsabilité dans le groupe. Je ne veux pas me rendre compte trop tard d'erreurs qui pourraient y être commises, comme cela se passe si souvent.  

10.09.2002

Notre initiative entend uniquement consolider l’AVS

Christoph Blocher défend l'initiative sur l'or et attaque le contre-projet du Conseil fédéral Interview dans L'Agefi du 10 septembre 2002 Le tribun dénonce avec véhémence la Fondation Suisse solidaire, qualifiée de pur "self-service" distribuant de l'argent sans contrôle. Edgar Bloch Le peuple devra se prononcer le 22 septembre sur l'initiative sur l'or lancée par l'UDC. Celle-ci propose de transférer les réserves monétaires excédentaires ou les revenus qui en seront tirés au fonds de compensation de l'AVS. Les modalités seront fixées par la loi. Pour faire le point sur cet objet, auquel s'oppose le Conseil fédéral qui présente un contre-projet, le conseiller national (UDC/ZH) Christoph Blocher répond à nos questions. Monsieur Blocher, le Conseil fédéral reproche à votre initiative de dépenser une fois pour toutes le capital constitué par la réserve d'or de la BNS. Que rétorquez-vous à cette critique? Christoph Blocher: Le Conseil fédéral ne dit pas ça. L'initiative sur l'or prévoit que le capital tiré des réserves d'or excédentaires de la BNS ne restera pas seulement à disposition durant 30 ans, mais pour toujours. Les revenus sont versés pour l'AVS et non pour la Fondation Suisse solidaire. L'initiative laisse deux possibilités au législateur: le capital de l'or reste en possession de la BNS ou va dans le fonds de l'AVS. Dans les deux cas, si l'on place à un taux moyen de 5% par an, cela produit un rendement d'un milliard de francs par an, pour une durée indéterminée. L'initiative sur l'or ne préconise pas une distribution de rentes aux habitants mais entend uniquement consolider l'AVS. On aurait pu verser directement à chaque personne en Suisse 3000 francs. Nous n'avons pas retenu cette idée. Un nouveau-né ne peut pas recevoir autant qu'une personne de 70 ans qui a cotisé toute sa vie. Et puis l'injection de vingt milliards de francs dans l'économie pourrait provoquer une surchauffe. En plus, le capital sera dépensé un jour. Avec l'initiative sur l'or, chacun payera moins pour l'AVS. Avec un milliard de francs par an, il n'est pas nécessaire d'augmenter la TVA, au minimum pendant dix ans. Que dit le Conseil fédéral? Il veut utiliser 7 milliards de francs sur 20 milliards pour une Fondation. A 5% par an, cela représente 350 millions de francs par an, soit 3,5 milliards de francs dans dix ans ou 10,5 milliards de francs dans trente ans. Et par la suite, il sera possible de répartir la fortune à raison d'un tiers pour les cantons, un tiers pour le Conseil fédéral et un tiers pour l'AVS. Ce sera dilapidé. Votre initiative est-elle vraiment solidaire, s'il faut de toute façon augmenter les taux de la TVA? Blocher: La plus grande institution de solidarité en Suisse est l'AVS, selon un mécanisme qui voit les riches payer le plus pour les pauvres qui perçoivent aussi le plus. Nous avons une responsabilité pour le bien-être de tous dans notre pays. Ici nous parlons de la fortune du peuple. Il ne s'agit pas de cadeaux, même si c'est toujours agréable d'en distribuer. Que l'on privilégie l'AVS me semble plus nécessaire que jamais avec les incertitudes économiques actuelles. Les jeunes se demandent s'il y aura encore suffisamment d'argent pour payer les rentes dans quarante ans. Voyez la discussion sur les taux à la baisse du 2e pilier avec le recul des bourses. La même remarque vaut d'ailleurs pour le 3e pilier où les rendements sont bien en dessous de l'an passé. Il est donc nécessaire d'utiliser ce que nous avons. Notre initiative permet aux individus de subir moins de réductions de leur salaire. Elle ne vise qu'à améliorer la situation qui permet aux Suisses de payer environ un milliard de francs de moins par an. L'attitude du gouvernement est typique de la mentalité dominante en cours chez nos politiciens: ils se contentent de répéter que c'est insuffisant pour l'AVS. C'est pour ces raisons que la Confédération est endettée pour plus de 100 milliards de francs, que nous dépensons deux milliards de francs pour Swiss et un milliard de francs pour l'Expo. Votre initiative ne pénalise-t-elle pas les cantons qui ont pourtant un droit aux bénéfices de la BNS? Blocher: Les cantons ne bénéficient pas d'un droit sur ces réserves. Ils perçoivent deux tiers des bénéfices des revenus de la BNS qui sont nécessaires à sa politique monétaire. Aujourd'hui, ils ont profité de l'augmentation des bénéfices de ces réserves passées de 1,5 milliard à 2,5 milliards de francs, répartis à raison d'un tiers à la Confédération et de deux tiers aux cantons. Dès 2003, les gouvernements cantonaux disposeront de 700 millions de plus qu'aujourd'hui de la part de la BNS. On leur verse donc beaucoup d'argent. Si on leur redistribue encore 300 millions de francs par an, comme le préconise le contre-projet du Conseil fédéral, ils ne diminueront en rien leurs dettes et leurs impôts. Au contraire, cette proposition augmente la quote-part de l'Etat, ce qui constitue un problème pour l'économie et le maintien de places de travail. Mais la Fondation Suisse solidaire n'a rien à voir avec le génocide nazi; elle est complètement tournée vers l'avenir. Blocher: Non, il est écrit que ces montants seront versés aux héritiers des victimes de génocides et du racisme, et d'encore beaucoup d'autres choses. On peut faire tout ce qu'on veut avec cette Fondation. Les cercles américains qui ont exercé des pressions ne cessent de nous répéter que nous leur avons fait des promesses. Il est évidemment impossible au Conseil fédéral de revenir sur ce qu'il a promis, mais le peuple est souverain et a tout loisir, lui, de dire non. La loi voulue par le contre-projet permet à l'étranger de nous dicter à quelles fins les montants seront affectés, pour moitié à l'étranger et aussi aux héritiers de génocides passés. Ce sera un vrai self-service. Que la Fondation soit explicitement obligée de soutenir pour moitié des bons projets en Suisse ne revêt aucun intérêt pour vous? Blocher: Naturellement, on peut trouver deux mille choses à soutenir, mais d'une part l'argent manque à l'AVS et d'autre part, il faut dire au peuple qu'on augmente les taxes. J'entends déjà chaque politicien formuler ses propositions: en faveur des mères célibataires, des jeunes, contre la lèpre, pour la culture, etc. Tant de choses méritent de l'aide. On distribuera trois cents millions de francs par-ci, par-là, sans le moindre contrôle démocratique. L'initiative sur l'or incite chacun à faire preuve de davantage de soutien individuel envers des institutions comme la Chaîne du Bonheur, par moins de TVA et de charges sociales prélevées sur les salaires. Le Conseil fédéral vous reproche de mettre en péril l'indépendance monétaire de la BNS? Blocher: C'est un argument non fondé. Ce n'est pas nous mais la BNS qui a décidé qu'elle disposait de 20 milliards de francs de trop. C'est la BNS qui décide qu'elle a des réserves qui ne lui sont plus nécessaires. L'indépendance monétaire est beaucoup plus mise en péril par les cantons et la Confédération qui veulent aller chercher et trouver l'argent à la BNS. Le Conseil fédéral exerce son influence sur la BNS parce qu'il en désigne le président. Et s'il s'avère que celui-ci est très faible, c'est un facteur négatif pour la BNS. Je regrette ainsi que celle-ci ait versé en son temps 100 millions dans le Fonds suisse en faveur des victimes de l'Holocauste avec les autres banques. Le fonds est aussi le résultat du chantage.

12.08.2002

La crise durera deux à trois ans, mais peut être salutaire pour la Suisse

Interview dans Le Temps de lundi 12 août 2002 Christoph Blocher admet que son ami et ancien partenaire en affaires Martin Ebner a sous-estimé les forces nécessaires à son empire. Selon lui, la crise boursière n'est pas une catastrophe, mais un asainissement. Quant à l'initiative sur l'or, elle est le seul moyen d'assurer le financement de l'AVS.Auteur: Othmar von Matt et Yves Petignat Martin Ebner est plongé dans une crise de liquidités. Allez-vous l'aider? Christoph Blocher: Non. On ne m'a pas demandé d'aide. Personnellement les moyens me feraient défaut parce que ma fortune est engagée dans mon entreprise, le groupe Ems, et que celle-ci ne peut, bien entendu, soutenir financièrement personne. Vous ne pourriez pas étendre votre participation chez Lonza pour soutenir Martin Ebner? Blocher: Non. Ems a une participation de plus de 10% auprès de Lonza parce que celle-ci est importante pour Ems. Nous n'avons pas l'intention de l'étendre ni, d'ailleurs, de nous en défaire. Quelles relations avez-vous encore avec Martin Ebner? Blocher: Je connais Martin Ebner depuis la période des études. Nous nous sommes depuis lors liés d'amitié. Mais son entreprise et la mienne sont complètement séparées. Je ne sais rien de plus que vous sur ses affaires, et seulement d'après la presse. Depuis des années nous avons mené avec BZ Bank, qui selon la Commission fédérale des banques est saine, de bonnes relations d'affaires avec entière satisfaction. Vous avez eu par le passé des relations étroites et amicales avec Martin Ebner. Cela ne vous touche pas personnellement qu'il soit en difficulté? Blocher: Naturellement, cela me touche chaque fois qu'un entrepreneur se retrouve en difficulté. Je sais à quel point succès et échec sont liés pour un chef d'entreprise. Quand tout va bien, il est riche, que cela tourne mal et il perd tout. La Banque BZ de Martin Ebner et ses sociétés Vision ne sont par chance pas en danger. Mais sa holding personnelle n'a plus de moyens suffisants pour tenir tous ses projets. C'est pourquoi il a dû vendre, ce qui doit être tragique pour lui. Pourquoi avez-vous vendu vos participations à Pharma Vision il y a cinq ans? Blocher: Martin Ebner, la société Rolex et moi personnellement possédions 51% de Pharma Vision, dont j'étais le président. A cette époque, il n'y avait qu'une seule société Vision. La stratégie était de se concentrer sur un petit nombre de "pharma" et d'entreprises de chimie. Cette société a connu un grand succès. Tous les actionnaires, grands ou petits, y ont gagné. Martin Ebner a fondé ensuite d'autres Vision supplémentaires: BK Vision (banques), Stillhalter Vision, etc. Une participation à ces sociétés n'entrait pas en ligne de compte pour moi. En 1997, il est apparu qu'il y avait une certaine logique à lui abandonner les 51% de Pharma Vision. Je me suis concentré davantage sur Ems et j'ai donc retiré ma participation. Malgré cette vente, nous nous sommes séparés en bons termes. Etiez-vous plus prudent que Martin Ebner.... Blocher: Par définition, un chef d'entreprise industrielle est plus prévoyant qu'un entrepreneur de la finance. L'industrie travaille à beaucoup plus long terme. Mais Martin Ebner n'avait pas calculé avec une crise de la Bourse aussi longue et aussi profonde. Il n'est pas le seul! ... ou bien est-ce votre sens politique qui vous a dit qu'il serait mieux pour vous de rompre l'association avec lui? Blocher: Chaque chose en son temps. Martin Ebner est l'un des banquiers les plus innovatifs. Lorsque j'ai repris le groupe Ems, en situation difficile, c'est lui qui m'a fait les propositions les plus intéressantes pour constituer le capital propre qui manquait. Je les ai appliquées avec succès. Dans les entreprises, Ebner a aussi fait bouger beaucoup de choses pour les actionnaires. On a alors commencé à prendre au sérieux le fait que les actionnaires sont les propriétaires de l'entreprise. Mais pour traverser une période boursière aussi mauvaise, ses forces ne suffisaient pas. Est-ce que Martin Ebner a éparpillé ses forces? Blocher: Il avait beaucoup de positions fortes comme actionnaire, de sorte qu'il était contraint de prendre des responsabilités dans beaucoup d'endroits pour participer à la conduite des affaires. En période difficile, il a manqué de liquidités et de forces pour opérer les changements indispensables. C'est ce qu'il a sous-estimé. Martin Ebner serait "un banquier froid, introverti et rationnel". Vous "l'entrepreneur et homme politique impulsif, chenapan, énergique, passionné, intéressé au pays et aux gens", écrit Fredy Gsteiger dans un livre consacré à votre biographie. Etes-vous aussi différents? Blocher: (Il rit.) M. Gsteiger ne me connaît pas du tout et il ne connaît pas Martin Ebner non plus. La description qu'il fait de vous tombe juste. Blocher: Ce n'est pas le lieu ici de parler de ma personnalité. Encore moins avec des personnes qui tiennent cela de gens qui ne me connaissent pas. Naturellement, Ebner et moi avons des caractères différents. Ebner se concentre sur ses affaires: le secteur bancaire. Moi sur l'industrie. Martin Ebner ne s'intéresse pas à la politique ou aux partis politiques. Il trouvait constamment que mon engagement politique était du temps perdu. Néanmoins, comme entrepreneur, il est partisan de la responsabilité individuelle. Des discussions politiques, nous n'en avions qu'au niveau le plus élevé. Tout le reste intéressait peu Ebner. Y a-t-il des points communs? Blocher: Ebner aussi est complètement animé par son objectif. Seulement il avait, avec les placements en capitaux, d'autres buts que moi. Ebner a vu que la création de plus-value est de la plus grande importance pour le deuxième et le troisième piliers de la prévoyance de retraite. Je me bats pour l'initiative sur l'or de la BNS, qui doit aller à l'AVS pour assurer le premier pilier. Tout cela n'est possible que dans le cadre d'une économie de marché fonctionnelle. Ebner a vu aussi le danger que les propriétaires puissent être dépossédés par un management autosatisfait. Sous ce rapport, nous pensons la même chose. Vous et Martin Ebner avez eu les mêmes visions des débats dans la Suisse des années 90: des impôts bas, moins d'Etat, des idées de privatisation pour l'AVS, assistance plutôt qu'Etat social. Blocher: Je n'ai jamais soutenu une "vision politique", je rejette expressément cela. Mais quel entrepreneur prévoyant, quel être humain responsable peut défendre autre chose que l'Etat de droit libéral, avec des impôts les plus bas et un haut degré de responsabilité individuelle? Des actions politiques? Nous n'en avons pas évoquées. Ebner n'aurait jamais été intéressé. Fredy Gsteiger, votre biographe, arrive à d'autres conclusions. Il écrit: "Il s'en est fallu de peu et ils (Christoph Blocher, Martin Ebner et Kurt Schiltknecht) seraient aujourd'hui des tireurs de ficelles de l'économie suisse, donnant le ton dans ce pays aussi bien économiquement que politiquement par l'UDC de Blocher. [...] Le trio avait de manière notoire un concept économico-politique. Ils avaient une idée, une méthode, un but". Blocher: (Il rit.) Quelle absurdité. Ma femme a lu ce livre. Il y a des pages avec au moins quatre erreurs de faits. (Il rit de nouveau.) Vous savez d'où vient sa thèse? De Peter Bodenmann, qui polémiquait là-dessus, bien que Kurt Schiltknecht appartienne encore à son parti, le Parti socialiste. Vous n'envisagiez pas de révolution? Blocher: C'est complètement faux. Moi, un révolutionnaire? (Il rit.) Quiconque s'engage pour davantage de responsabilité individuelle, moins de bureaucratie ou des impôts plus bas aurait une activité de conspirateur? Il est économiquement prouvé depuis longtemps que seuls les Etats qui suivent cette politique ont du succès. Depuis près d'un an, nous subissons un krach boursier par à-coups. A quel point le jugez-vous dramatique? Blocher: Dans une perspective à long terme, cette évolution n'est pas un bouleversement mondial. Il s'agit d'une correction qui nous entraîne un peu vers le bas, comme auparavant, dans les années 90, vers le haut. On ne doit pas oublier que nous avons eu une période dorée dans les années 90. Douze années de haute conjoncture à la suite, comme aux Etats-Unis, on n'avait jamais vu cela depuis la Seconde Guerre mondiale. Etes-vous un optimiste? Blocher: Non. En affaires, essentiellement prévoyant, pessimiste. J'ai souvent peur que cela aille de travers. Je suis au contraire optimiste en ce que je crois au cours des choses. Mais comme entrepreneur je n'ai pas seulement une "saine foi en Dieu" mais aussi une confiance dans la réalité du marché. Le remarquable peintre suisse Albert Anker, qui observait bien le monde, résumait ainsi son œuvre: "Regarde, le monde n'est pas damné." Cette certitude a de la valeur et je m'y suis toujours tenu. Si cela va bien, je sais aussi que ce ne sera pas toujours ainsi. C'est ce que doivent apprendre beaucoup de gens aujourd'hui. C'est ce qu'oublient très vite les gens - malheureusement les chefs d'entreprise également. Jeunes banquiers, habitués de la Bourse et jeunes entrepreneurs vivent pour la première fois une telle récession boursière. Comment jugez-vous la situation? Blocher: L'évolution de la Bourse n'est pas la conséquence du 11 septembre. Après une période de bonne conjoncture dans les années 90, nous avons aujourd'hui une baisse de conjoncture. Elle ne durera pas seulement trois mois, mais deux ou trois ans. C'est ce que nous apprend l'expérience. Les Bourses réagissent par anticipation, souvent en exagérant. La baisse de conjoncture n'est pas une catastrophe, il n'y a pas une chute catastrophique sur les marchés. Les bonnes entreprises, solides, résistent. Ce sont les entreprises qui ont une marge bénéficiaire trop étroite ou un rendement des actions insuffisant qui disparaissent essentiellement actuellement. Celui qui a fait trop de dettes, qui présente un trop faible capital propre se retrouve en difficulté. C'est ce qui a été aussi fatal à Ebner. C'est un rééquilibrage. C'est pourquoi je suis persuadé que nous avons une bonne perspective pour le futur. Vous parlez de la Suisse? Blocher: Mais aussi des autres pays. La Suisse a assurément un bel avenir après cela, si elle ne se nivelle pas par le bas, si elle ne s'aligne pas sur l'Union européenne. Si elle place au centre liberté et responsabilité. Car la Suisse a sur le marché mondial l'avantage d'une haute qualité et d'un haut niveau de formation. Nous devrions rester recherchés sur le marché mondial si nous suivons la voie traditionnelle de l'économie libérale, en mettant au centre la responsabilité individuelle, une faible intervention de l'Etat et la défense de notre indépendance. Est-ce qu'avec ce credo vous avez changé quelque chose dans les années 90? Blocher: Hélas non! Une "coalition fatale" au bon sens de socialistes, radicaux et démocrates-chrétiens a augmenté les impôts, contre l'opposition farouche de l'UDC, comme dans aucun autre pays industriel au monde, ces dix dernières années. Malgré une extraordinaire haute conjoncture, dans les années 90, les dettes de la Confédération et des cantons - plus de 200 milliards de francs - ont pris une dimension qu'on n'avait jamais connue auparavant. En outre, nous nous rapprochons toujours plus fortement de l'Union européenne, nous sacrifions nos forces. Contre mon gré. Nous n'avons pas moins d'Etat et de bureaucratie. Au contraire nous nous sommes "socialisés". Les événements de ces derniers temps n'ont-ils pas amené à une plus grande pression de la population, du Parti socialiste, mais aussi du Parti radical, contre la politique de l'UDC? Blocher: Au contraire. La politique de l'UDC est plus indispensable que jamais. Notre politique économique est garante des emplois et de l'assistance sociale. L'image du rôle de l'Etat dans l'opinion publique a changé, notamment après le 11 septembre. Les gens ont besoin de davantage de sécurité. Blocher: L'UDC se bat pour cela depuis des années. Pas seulement depuis le 11 septembre. La première tâche de l'Etat est la sécurité, à l'intérieur comme vers l'extérieur. Elle n'est qu'imparfaitement assurée. Pour la sécurité matérielle, c'est ensuite à chaque individu d'être personnellement responsable de lui-même. Beaucoup, dans la population active, ont l'impression de se faire rouler parce qu'ils doivent verser vraiment beaucoup pour les impôts, les taxes et les redevances. Beaucoup de gens bénéficient de rentes de l'Etat, qui offre tout, du Bureau de l'égalité à l'OSEC, de Présence Suisse, soutien à la culture, à une Expo à milliards, des milliards pour une société d'aviation privée jusqu'aux activités de relations publiques inutiles. Ne pensez-vous pas qu'en raison de l'évolution économique il y a un besoin supplémentaire de contrôle de la part de l'Etat? Blocher: Je ne vois pas où. Quoique je ne sois pas contre tout contrôle. Aux Etats-Unis, de nombreux managers en faillite ont été arrêtés menottes aux poignets. Est-ce une vision d'avenir? Blocher: Celui qui fait une escroquerie doit être puni. Pour cela, il n'y a pas besoin de nouvelle loi. Il n'y a pas besoin de dispositions détaillées. Les Etats-Unis ont des prescriptions légales sur la comptabilité plus détaillées que dans aucun pays. Malgré cela, ou plus précisément à cause de cela, de graves infractions ont été commises. Il serait plus honnête d'accepter les conséquences du fait qu'il y a plusieurs possibilités de considérer un bilan. On ne peut pas établir un bilan qui soit scientifiquement juste ou faux, même si l'on prête serment sur la comptabilité. Avec ces mesures, on veut simplement tranquilliser les gens. Je ne vois ici aucune nécessité de nouvelle loi, sinon pour simplifier et ouvrir davantage. En somme, vous jugez la situation actuelle relativement tranquille? Blocher: Nous n'avons pas une crise qui verrait s'écrouler massivement les entreprises. Il est vrai que les plus grandes Blocher: sociétés du monde et les plus renommées sont concernées. Je pense à Enron, WorldCom, Swissair, de grandes sociétés d'assurances, Andersen, etc. Pourquoi? Blocher: Elles ont échappé durant longtemps à la critique. Leur taille a aveuglé. En outre le gigantisme a rendu ces firmes impossibles à surveiller et difficiles à contrôler et à conduire. Je n'ai jamais cru, dans les années 90, au gigantisme ni en politique ni dans l'économie. Ces constructions gigantesques n'ont pas de stabilité. Est-ce que l'on a oublié le mot modestie? Blocher: Les grandes entreprises ont eu les yeux plus gros que le ventre. Mais parce que la conjoncture était favorable, cela n'est pas apparu. Je vois le problème dans l'absence de limite. En politique on ne veut plus de frontière, en économie, les grandes entreprises se développent sans limite. Lorsqu'un géant s'écroule, les conséquences sont gigantesques. C'est réellement un manque de modestie. Pour un entrepreneur, il est central d'avoir en tête des notions comme: vue d'ensemble, simplicité, responsabilité. Responsabilité dans quel sens? Blocher: Toutes les entreprises qui s'écroulent n'ont pas failli à leurs obligations. Derrière chaque décision, il y a le risque d'une erreur. Malgré tout, chaque chef d'entreprise est responsable. La responsabilité est la notion centrale de la direction. Si l'on accepte une responsabilité dans un domaine, on accepte les conséquences, que l'on soit coupable ou non. Je suis responsable pour tous, quoi qu'il se passe au sein du groupe Ems, même si dans l'un ou l'autre cas je n'ai pas commis de faute. Les managers ont de hauts salaires parce qu'ils ont de grandes responsabilités. Le manager ne doit toutefois être bien payé qu'en cas de succès. En cas d'échec, non. C'est la caractéristique de l'entrepreneur. Si le manager ou l'entrepreneur est bien payé même en cas d'échec, cela est irresponsable. Comment renforcer cette conscience? Blocher: Tout en remplissant sa tâche. Cela donne confiance. Et celui qui n'assume pas ses responsabilités doit être remplacé. Cela aussi donne confiance. Cela vaut aussi pour le Conseil fédéral? Blocher: Naturellement. Ce principe est toutefois difficilement applicable en politique parce que la responsabilité y est partagée. Le Conseil fédéral est composé de sept personnes. Mais la responsabilité ne peut pas être partagée.